Cet article est une des clés afin de bien comprendre le rôle que joue l’intestin dans la santé. Je vais aborder toutes les notions nécessaires à la compréhension des organes très importants que sont le côlon et l’intestin grêle.
L’intestin possède 3 caractéristiques importantes, en dehors de celles concernant la digestion.
Tout d’abord, il regroupe plus de 500 millions de neurones, soit 200 fois moins que dans le cerveau auquel il est relié par le nerf vague, mais 5 fois plus que la moelle épinière. L’ensemble de ces neurones forme le système nerveux entérique. La particularité de ce système est que c’est le seul groupement important de neurones, en dehors du système nerveux central qui forme des circuits capables d’activité de reflux autonome [1]. Pour cela, il est appelé « deuxième cerveau ». De plus, il contient entre 70 et 80 % des cellules immunitaires du corps humain [1]. Enfin, il sécrète une vingtaine de neurotransmetteurs identiques à ceux fabriqués par le cerveau [2,3], comme la sérotonine [4], qui joue un rôle dans l’humeur, l’émotivité, le sommeil…
L’intestin est un organe très important, mais dont les gens ne se préoccupent pas beaucoup. En effet, certaines pathologies comme la constipation, les diarrhées fréquente, les ballonnements sont acceptés par la population et considérés comme normaux. Nous verrons que cette vision n’est pas bonne et que l’intestin est un organe qui ne doit pas être mis au rang d’organe à problème et auquel nous devons porter une attention particulière.
1. Anatomie de l’intestin
En règle générale, on divise l’intestin en 2 parties.
1.1. L’intestin grêle
L’intestin grêle s’étend de l’estomac au côlon. Il mesure entre 5 et 6 mètres et est constitué de 3 parties :
- Le duodénum, qui entoure le pancréas
- Le jéjunum, qui est composé d’anses horizontales
- L’iléon, qui est composé d’anses verticales
1.2. Le côlon
Le côlon mesure environ 1,5m. Il commence par le caecum et l’appendice, suivi du côlon ascendant, vertical, situé dans la partie droite de l’abdomen. Il se poursuit par le côlon transverse, horizontal. Lui fait suite le côlon descendant, vertical, situé dans la partie gauche de l’abdomen. Il se poursuit par une boucle nommée sigmoïde. Le côlon se termine par l’ampoule rectale qui débouche sur l’anus. Le côlon a un aspect sacculé. Le diamètre interne du côlon est plus grand que celui de l’intestin grêle.
2. La muqueuse intestinale
2.1 De l’intestin grêle
La paroi intestinale est formée d’un ensemble de couches superposées qui sont, du dehors vers le dedans (lumière intestinale) : la couche séreuse, la couche musculeuse, la couche sous muqueuse et la couche muqueuse.
La couche qui va nous intéresser est la couche muqueuse. Elle est formée par un épithélium reposant sur du tissu conjonctif. La muqueuse présente des villosités, séparée par des cryptes, afin d’augmenter la surface d’échange de l’intestin qui est de 100 m2 de surface, et jusqu’à 600 m2, si l’on prend en compte la bordure en brosse présente au pôle apical des entérocytes [5]. Son épaisseur est de 1/40 de mm [5]. Les villosités possèdent une artériole, une veinule, un réseau capillaire, des petits vaisseaux lymphatiques drainés par un chylifère central [5]. Parmi les cellules qui composent cet épithélium, on rencontre les entérocytes, les cellules à mucus, les cellules de Paneth, les cellules endocrines et les cellules M [5].
2.2 Du côlon
L’architecture du gros intestin est différente de celle de l’intestin grêle. Les villosités disparaissent car les aliments n’ont plus besoin d’être assimilés ou digérés [6]. Le côlon doit surtout résorber l’eau restant dans les selles. Ensuite, il ne restera plus que du chyme les selles qui seront expulsées.
Au niveau du côlon, les cellules les plus présentes sont les colonocytes.
La muqueuse intestinale a pour rôle [2] :
- De laisser passer les nutriments tels que les vitamines, minéraux, acides gras…
- De jouer le rôle d’une barrière contre les éléments toxiques tels que les bactéries, virus, parasites, aliments partiellement digérés…
La flore intestinale et le système immunitaire aident la muqueuse intestinale à jouer ces rôles
3. Les entérocytes
Les entérocytes sont les cellules cylindriques [5], les plus présentes dans la muqueuse de l’intestin grêle. Elles présentent à leur pôle apical des microvillosités, permettant d’augmenter la surface d’échange avec la lumière de l’intestin [5]. Leur durée de vie est de 7 jours, sauf dans l’iléon ou elle est de 3 jours seulement [5]. Cependant, leur renouvellement est rapide. Les cellules sont liées entre elles par : les jonctions serrées, les jonctions adhérentes ou encore les desmosomes. Retenez surtout l’existence des jonctions serrées ou tight junctions qui sont très importantes, nous y reviendrons plus tard. Les entérocytes synthétisent des enzymes qui vont terminer la digestion des grosses molécules comme les glucides, les lipides, les protéines, en molécules plus petites telles que les sucres simples, acides gras simple, acides aminés. Ces molécules plus petites vont être absorbées et passer dans la circulation sanguine. Leur nutriment de base est la glutamine, un acide aminé présent dans les protéines.
A savoir : Les colonocytes, ont pour source d’énergie préférentielle les acides gras à chaînes courtes (AGCC), issus de la fermentation des fibres et des acides aminés [7]. Parmi l’acide butyrique (et le butyrate), l’acide propionique (et le propionate), et l’acide acétique (et l’acétate), qui sont les 3 principaux, le butyrate représente le principal substrat énergétique des cellules de l’épithélium colique, qui est utilisé à plus de 80 % par ces cellulues [3,7]. De plus, il aurait un effet prophylactique ou thérapeutique, notamment comme antidiarrhéique, dans le traitement des colites de diversion, de la rectocolite ulcéro-hémorragique, des pochites, des rectites radiques et des cancers colorectaux [7]. L’acide butyrique permet aussi une activité anti-inflammatoire importante et le maintien de l’intégrité de la muqueuse intestinale [3].
4. Les rôles de l’intestin grêle
Comme on peut s’en douter, il a un rôle dans la digestion des aliments en dégradant les molécules complexes en molécules simples : comme les protéines, les lipides et les polysaccharides qui sont transformés respectivement en acides aminées, corps gras simple et sucres simples ; à l’aide d’enzymes protéolytique, lipolytique ou glycolytique qui proviennent de différents organes et qui se déversent pour certaines dans l’intestin. La plus grosse partie de la digestion s’effectue au niveau du duodénum. Il permet l’absorption sélective des substances digérées [5]. Cette absorption se fait de manière passive au niveau des jonctions serrées [5] ou de manière active [5] au niveau de la membrane apicale puis basolatérale. Il permet aussi la progression du bol alimentaire à l’aide du péristaltisme, provoqué par la contraction de la musculature lisse de la paroi de l’intestin. Mais il est aussi le siège d’une multitude d’opération permettant à l’organisme de se défendre contre les agressions microbiennes, d’éliminer les substances toxiques, d’assimiler des nutriments indispensables et de participer à la fabrication de certains éléments vitaux [2].
5. La flore ou biotope intestinal
Le tractus digestif de l’Homme, contient environ 1014 bactéries [5], pesant environ 2 kilos, ce qui représente 10 fois le nombre de cellules de l’organisme. Le tractus digestif est colonisé à la naissance, par les bactéries présentes dans l’air, dans les aliments ainsi que dans le vagin, le rectum et le côlon de la mère, etc… Elle est abondante au niveau de l’intestin grêle supérieur (103 à 106 bactéries), mais encore plus au niveau inférieur (106 à 107 bactéries), enfin c’est au niveau du côlon qu’elles sont les plus présentes (109 à 1011 bactéries) [5]. Il faut savoir, que les bactéries représentent 50 % du poids des selles. On dénombre 400 espèces et selon certains auteurs [2] jusqu’à 1000 espèces de bactéries différentes, dans l’intestin grêle, avec les bactéries aérobies au début et anaérobies à sa sortie. On distingue aussi la flore de passage, qui ne peut se développer et une flore résidente, ou saprophyte, qui elle se développe et qui est la flore dominante.
A savoir : On rencontre aussi un champignon : le Candida albicans [2].
Il existe selon le Dr Seignalet [1], 7 facteurs qui peuvent influencer la composition de la flore intestinale de l’intestin grêle :
- L’acidité gastrique : s’il y a un manque d’acide chlorhydrique, les bactéries sont 10 000 fois plus nombreuse dans la partie supérieure de l’intestin grêle.
- Le péristaltisme : s’il est augmenté, surtout dans la partie supérieure de l’intestin grêle, les germes sont expulsés vers la partie inférieure.
- Les interactions entre bactéries : certaines bactéries permettent ou empêchent le développement d’autres bactéries.
- L’alimentation : qui favorise la flore de putréfaction, lors d’un régime carné, et la flore de macération, dans le cas d’une alimentation majoritairement végétarienne
- Les anticorps sécrétés par les plasmocytes de la paroi intestinale : les IgA secrétaires, les plus importants, inhibent la prolifération microbienne et empêchent qu’ils adhèrent à la muqueuse de l’intestin grêle.
- Le mucus : empêche l’action de certaines bactéries et en protège d’autres, de l’acide chlorhydrique, des enzymes digestives et des anticorps.
- La capacité de certaines bactéries à adhérer à des récepteurs spécifiques des cellules de l’épithélium intestinal, ce qui peut altérer la morphologie et les fonctions des villosités.
Nous verrons plus tard que le sport peut aussi jouer un rôle sur la flore intestinale.
Il faut savoir, que la flore du côlon est divisée en deux flores distinctes :
- La flore de fermentation [3], présente au niveau du côlon ascendant, où sont fermentés les glucides et où l’on retrouve la majorité des bonnes bactéries. La flore de fermentation se nourrit de fibres et métabolise les glucides [2], elle produit des gaz inodores tels que le dioxyde de carbone (CO2) et le dihydrogène (H2).
- La flore de putréfaction [3], où sont présentent les bactéries pathogènes, situé au niveau du côlon descendant. C’est ici que sont métabolisées les protéines. Dans le côlon descendant, l’acidité est plus forte. La fermentation des protéines peut produire des toxines et des molécules cancérigènes ; ainsi que des gaz odorants [2] dont : l’ammoniac, l’indole, le scatol, le sulfure d’hydrogène… Ce sont des substances toxiques qui vont encrasser le foie [2].
A savoir : Les personnes qui ne mastiquent pas assez, ou qui ont une insuffisance de sécrétion enzymatique, peuvent avoir des aliments partiellement digérés au niveau du côlon ce qui peut provoquer un excès de fermentation ou de putréfaction.
Il existe un équilibre entre ces deux types de flore : la symbiose.
Cet équilibre peut varier selon deux mécanismes [3] :
- indirect : lorsque l’alimentation est composée en grande partie de fibres fermentables, la flore de fermentation va se multiplier et prendre l’ascendant sur la flore de putréfaction.
- direct : lorsque l’alimentation entraîne un développement plus important de la flore de putréfaction, par la consommation plus importante en protéines, ce qui augmente l’acidité et augmente l’activité du système immunitaire, dans le but d’éliminer les mauvaises bactéries. L’élimination peut aussi se faire par l’augmentation du transit intestinal.
Le déséquilibre entre ces deux flores s’appelle une dysbiose.
5.1. La dysbiose
Une flore déséquilibrée est un risque de chamboulement du système immunitaire, qui peut favoriser certaines allergies et une moins bonne défense générale de l’organisme. On sait qu’un déséquilibre de la flore est source d’allergie notamment comme l’asthme, la dermatite atopique, les allergies alimentaires [8]. Mais il peut aussi causer des inflammations de l’intestin, un cancer colorectal et une maladie du foie gras non alcoolique [9].
Une dysbiose peut être à l’origine de troubles digestifs tels que le côlon irritable et les troubles communs comme les ballonnements, les diarrhées, la constipation, les rôts, la mauvaise haleine (expiration de gaz intestinaux volatils), les spasmes, les colites [2]. Mais aussi, la candidose digestive et vaginale [2]. Mais il faut savoir que 50 % des dysbiose ne présentent pas de signes digestifs [6].
De plus, elle peut aussi être la cause d’une diminution de la synthèse des enzymes digestives mais aussi des vitamines du groupe B et K [2].
Les principales causes d’une dysbiose sont [2-6] :
- Une trop forte consommation de sucre et/ou de protéines, qui va modifier la flore au niveau du côlon.
- Une mauvaise mastication des aliments.
- Un défaut d’acide chlorhydrique.
- Une déficience en bile ou un pancréas déficient, donc une déficience en enzyme.
- Un manque de fibres.
- Les séquelles d’infection.
- Certains traitements médicaux : les antibiotiques, les radiothérapie et chimiothérapie.
- Une inflammation chronique.
- Le stress.
5.2. La symbiose entre la flore et son hôte
En plus de la symbiose entre les bactéries qui composent la flore intestinale, il existe une symbiose entre les bactéries et leur hôte. En effet, les bactéries se nourrissent de nutriments issus de la digestion des aliments mais en contreparties, elles aident leur hôte de manière très diverse [2-5] :
- Elles aident à la régulation du transit intestinale.
- Elles synthétisent des vitamines : B1, B2, B6, B8, B9, B12 et participent à la synthèse de vitamine K.
- Elles synthétisent des enzymes.
- Elles terminent la digestion de certains aliments.
- Elles dégradent les pigments biliaires.
- Elles soutiennent et modulent le système immunitaire.
- Elles aident l’organisme à se défendre de certaines pathologies, comme le cancer par exemple.
- Elles freinent le développement des levures, champignons et pathogènes.
- Elles libèrent des polyamines, qui en dose physiologique, vont nourrir les entérocytes.
- Elles dégradent les fructo-oligosaccharides (FOS), ce qui permet la synthèse de N-butyrate, qui aide au développement d’une muqueuse en bonne santé et qui diminue les risques de cancer du côlon et les inflammations, comme nous l’avons vu plus haut.
5.3. Les études récentes sur la flore intestinale
Une étude pilote a montré qu’il pouvait y avoir un bénéfice sur l’humeur et la cognition à la supplémentation en probiotique important (25 milliards de bactéries) [10], notamment en agissant de manière positive sur l’anxiété. Mais il faut savoir que le meilleur moyen de modifier sa flore intestinale, est de changer son alimentation. En effet, en moins de 24 heures la flore intestinale commence à se modifier [11].
Par ailleurs, il a été mis en évidence, récemment (2014), que la flore intestinale humaine, par rapport à celles des singes sauvages, a connu une réduction de la diversité microbienne ancestrale et une augmentation de la fréquence des taxons bactériens associés aux régimes alimentaires à base d’animaux [12]. Les conséquences de cette réduction de la diversité bactérienne dans le microbiote de l’intestin humain restent inexplorées. Cependant, les faibles niveaux de diversité bactérienne dans le microbiome ont été associés aux troubles gastro-intestinaux, à l’obésité et aux maladies auto-immunes. Cette étude met peut-être en avant, une accélération de l’évolution de la flore intestinale chez l’Homme.
6. Le système immunitaire de l’intestin grêle
Nous l’avons vu au début de cet article, l’intestin contient entre 70 et 80 % des cellules du système immunitaire du corps. C’est donc une réserve de cellules défensives. Les cellules immunitaires assurent la défense de l’organisme face aux agressions des agents pathogènes et favorisent la tolérance aux aliments [2]. L’intestin participe aussi au maintien de l’écosystème intestinal [2]. La défense immunitaire de l’intestin [5] s’organise autour de 2 structures :
- Les cellules présentes dans la muqueuse représenté par : les lymphocytes B, les plasmocytes, les lymphocytes T auxiliaires (CD4) et cytotoxiques (CD8), les macrophages, et de manière moins importante, les mastocytes, les polynucléaires neutrophiles et les polynucléaires éosinophiles.
- Les follicules lymphoïdes et les plaques de Peyer, qui sont des formations plus complexes.
A savoir : L’intestin grêle possède aussi un système de défense non immunitaire [5], composé par :
- Le suc gastrique, bactéricide grâce à son acidité.
- Le suc pancréatique et la bile qui fractionnent les macromolécules ingérées et forme un courant liquidien qui emporte les germes.
- La motricité de l’intestin.
- Le renouvellement rapide des cellules de la muqueuse intestinale
- La flore intestinale, qui comme nous l’avons vu, empêche la multiplication des germes pathogènes.
- Les sécrétions intestinales émises au niveau des cryptes
- Le mucus avec les peptides trifoliés et les mucines qui pourraient neutraliser les agents agresseurs de l’intestin.
- Les lysozymes, qui sont des enzymes qui dégradent la paroi des bactéries
- Les défensines et les peptides antimicrobiens.
7. L’hyperperméabilité intestinale
7.1. La physiologie
Comme nous l’avons vu plus tôt, la muqueuse intestinale constitue une barrière entre le milieu intérieur et l’environnement, avec pour composant principal les entérocytes liés par des jonctions serrées. Elle sélectionne les substances qui peuvent entrer ou non dans l’organisme afin d’empêcher les substances pathogènes d’entrer dans l’organisme. Chez les personnes qui n’ont pas d’hyperperméabilité intestinale, il faut savoir que l’intestin est tout de même perméable, et que certains peptides [5] et même certaines protéines, comme celles des œufs et du lait par exemple, [5] traversent cette barrière en quantité faible mais non négligeable. 1/1000 des protéines intactes traverserait la muqueuse intestinale [5].
La perméabilité est régulée par des peptides régulateurs [5], synthétisés soit par le système nerveux central ou le système nerveux périphérique ou encore les cellules endocrines du tube digestif et du pancréas [5].
La zonuline :
La zonuline est une protéine, qui selon Venesson [13] peut être considérée comme une hormone, dont la découverte a été faite en 1990. Cette hormone est sécrétée par les entérocytes de la muqueuse intestinale. Elle joue différents rôles, notamment : la régulation des mouvements de l’eau, la régulation des passages des molécules et des globules blancs de l’intestin vers le sang et celui des bactéries [13]. Tout cela, en favorisant l’écartement des jonctions serrées ce qui favorise la perméabilité de la muqueuse intestinale [2]. La zonuline peut être agressée par des substances toxiques sécrétées par les bactéries ou bien être perturbée par des produits chimiques environnementaux comme les perturbateurs endocriniens ou pesticides et par l’alimentation [14].
La dérégulation de la zonuline peut être la porte d’entrée biologique à de nombreux troubles comme les maladies auto-immunes, les inflammations et les cancers [15].
A savoir : De nouvelles stratégies thérapeutiques visent à rétablir l’intégrité de la barrière intestinale par une régulation négative de la voie de la zonuline. Ces stratégies offrent des approches innovantes et non encore explorées pour la gestion de ces maladies chroniques [15].
7.2. La pathologie : l’hyperperméabilité intestinale ou leaky gut syndrome
L’hyperperméabilité intestinale est présente lorsque les jonctions serrées de l’intestin sont altérées, ou «distendues», les macromolécules telles que les bactéries, les protéines alimentaires, des débris de cellules mortes peuvent traverser la muqueuse de manières excessives. De ce fait, les antigènes et les protéines qui ont passé la muqueuse peuvent déclencher une réaction immunitaire à l’origine d’inflammations ou de maladie auto-immune par le biais de réactions croisées. Une réaction croisée se produit lorsque le système immunitaire reconnaît un antigène comme du « non-soi », mais que cet antigène ressemble à une molécule du « soi ». Le système immunitaire s’attaque donc à l’organisme qu’il est censé défendre. Toutes les maladies auto-immunes ont pour origine une réaction croisée.
7.2.1. Les causes de l’hyperperméabilité [2-5-6-13]
- Certaines bactéries qui vont léser les cellules épithéliales
- La gastro-entérite
- Certains médicaments : les anti-inflammatoires non stéroïdiens (aspirine, ibuprofène…), les salicylés, les corticoïdes, les laxatifs, mais surtout les antibiotiques (surtout au long cours et lorsqu’ils sont pris de manière groupée)
- L’interféron
- La radiothérapie et chimiothérapie
- Les radicaux libres en excès
- Les pesticides
- Certains polluants
- Le tabac (probablement)
- L’alcool en consommation déraisonnée et chronique
- Certains aliments : notamment l’alimentation moderne, la caséine, les gliadines, la pomme de terre, les solanacées (tomates, aubergines, piments, poivrons) ou le déficit d’apport en matériel permettant la multiplication des entérocytes
- Le déficit en zinc ou en vitamine D
- La malnutrition, la dénutrition et le jeûne
- Le stress
- La dysbiose : notamment par augmentation de la flore de putréfaction ou le développement de levures
- Le sport intensif
- L’hypoxie d’altitude
Cette liste est longue, mais elle n’est pas exhaustive, j’ai tout de même essayé de rassembler un maximum d’informations, dans le but de vous aider à cibler ce qui peut causer l’hyperperméabilité intestinale si vous pensez en souffrir ou si vous voulez simplement l’éviter.
7.2.2. Les conséquences d’un intestin hyperperméable
- Les allergies : sont des réactions exacerbées du système immunitaire [2-16], impliquant des anticorps de type IgE, contre des substances bien tolérées en général. Les symptômes les plus communs sont les démangeaisons, les éternuements, et parfois la mort par anaphylaxie. Elles peuvent être héréditaires et sont en général connues tôt chez l’individu. Ce sont les allergies immédiates [6]. S’il l’intestin est hyperperméable, les substances allergènes vont traverser la muqueuse intestinale et se comporter comme des agresseurs pouvant engendrer [2] : dermatite atopique, eczéma, urticaire, asthme, rhinite, conjonctivite…
Il existe aussi les allergies à IgG [6], qui dépend de la quantité d’antigène ingérée (qui est en générale plus importante que celles nécessaire pour déclencher une allergie à IgE). Elles se produiraient aussi plus tardivement, entre plusieurs heures ou jours après l’ingestion, et se manifesteraient par des signes digestifs (ballonnements, diarrhée, constipation, gaz, colite, indigestion, gastrite…) ou respiratoire (écoulement nasal chronique, sinusite ou otite récidivante, asthme et bronchite chronique. Elles pourraient s’accompagner de signes généraux tels que : douleurs articulaires, maux de tête, vertiges, bourdonnement des oreilles, conjonctivites, crampes… mais ne touchent en aucun cas la peau [6].
Les aliments les plus souvent identifiés comme allergènes sont : le lait de vache, les œufs (le plus allergisant chez l’enfant) [6], le poisson (avec les crustacés et les mollusques), les arachides, les noix dans leur ensemble, les céréales, les fruits et légumes (représentant 50 % des manifestations allergiques chez l’adulte, se manifestant par des symptômes au niveau oro-pharyngé, cependant la cuisson permet de détruire les protéines allergisantes en général) [6]. Pour les fruits, et légumes, les allergies les plus communes, sont le kiwi, la fraise, le melon, la banane et les épinards [2-6].
- Les intolérances alimentaires : sont l’incapacité de l’organisme à digérer un aliment ou un composant d’un aliment. Elle implique le métabolisme et non le système immunitaire [6], bien que les symptômes puissent être similaires (nausée, diarrhée, crampes d’estomac…). Elles sont le reflet d’une insuffisance digestive en enzyme [2].
Les aliments les plus souvent identifiées comme source d’intolérance sont : le lait (avec le lactose) et les produits laitiers, les céréales à gluten, le kiwi, l’œuf…
Pour les allergies il existe des tests fiables, qui font la recherche des anticorps IgE, ces tests sont validés par la science. Les aliments provoquant des allergies à IgE doivent être exclus définitivement.
Or, pour les intolérances ils recherchent la présence d’IgG, mais ces tests ne permettent pas d’affirmer que vous ne devez pas consommer ces aliments.
La détection des anticoprs anti-IgG :
Il se peut que l’on vous conseille une prise de sang, afin de déterminer les aliments à l’origine de la production d’IgG anti-aliments. Cependant, la présence d’IgG est un phénomène normal [18]. En effet, les IgG anti-aliments sont produites en grande quantité lors de l’acquisition de tolérance chez le sujet sain, elle témoigne donc de la guérison de l’allergie. De plus, les IgG anti-aliments peuvent être détectées en raison d’une réaction croisée entre un aliment et un allergène respiratoire. Ainsi, une personne allergique produit des IgE, mais aussi des IgG contre les allergènes respiratoires comme le pollen de bouleau ou les acariens, lesquelles peuvent réagir avec des protéines semblables présentes respectivement dans les fruits, les légumes, les crustacés et les mollusques, on appelle cela les allergies croisées.
Il existe des allergies croisées qui peuvent concerner le pollen de bouleau et la pomme, la poire, la fraise, la framboise, l’amande, la noisette… Entre le latex et la banane, le kiwi, l’avocat… Ou encore entre arachide et légumineuse, lait et protéines de bœuf, œufs et viande de volaille par exemple…
Pour cela, la présence d’IgG anti-aliments est un phénomène normal chez la majorité des sujets sains et chez les allergiques, qui représentent environ 25% de la population française [18]. Les recommandations internationales déconseillent les dosages d’IgG anti-aliments [18]. Les sociétés savantes d’immunologie et d’allergologie de plusieurs pays d’Europe, l’Académie Européenne d’Allergologie et d’Immunologie Clinique, l’Académie Américaine de l’Asthme, d’Allergie et d’Immunologie (AAAAI), la Société Sud-Africaine d’Allergologie et la Société Australienne d’Immunologie et d’Allergologie [18], ont reconnu les dosages d’IgG anti-aliments comme des tests inutiles pour diagnostiquer les allergies ou les intolérances aux aliments [18]. Enfin, la première des 10 recommandations du « Choosing wisely » (choisir judicieusement) rédigées par l’AAAAI à l’attention des médecins et des patients est de ne pas effectuer de tests-diagnostique non prouvés comme les IgG anti-aliments [18]. La Société Française d’Allergologie [18], approuve ces recommandations et déconseille le dosage des IgG anti-aliments [18].
Cependant, certains auteurs [6], conseillent, si on vous a prescrit une prise de sang dosant les IgG, d’éviter les aliments provoquant la production d’IgG, temporairement.
- Les inflammations : comme nous l’avons vu plus, haut un intestin hyperperméable favorise l’inflammation. En effet, la formation de complexes antigène-anticorps phagocytés engendre une production de molécules pro-inflammatoires, qui, lorsqu’elles sont en excès, vont se répandre dans la circulation sanguine et affecter l’ensemble de l’organisme [2] et déclencher tout un tas d’inflammation : sinusite, arthrite, tendinite, artérite, colite, conjonctivites, cystite.
- Les maladies auto-immunes : la survenue d’une maladie auto-immune, dépend [13] de la susceptibilité génétique, de l’exposition à un antigène (aliment, bactérie, peut-être les polluants) et de l’introduction de cet antigène dans l’organisme. La porte d’entrée pouvant être les poumons et 20 fois plus souvent [5] l’intestin. Les maladies auto-immunes sont souvent déclenchées à la suite d’une gastro-entérite ou d’une infection intestinale [13], deux pathologies qui perturbent la zonuline.
Nous en avons parlé précédemment, celles-ci ont pour origine une réaction croisée pouvant provoquer : la clérose en plaques, la maladie de Basedow, la maladie de Crohn, la spondylarthrite ankylosante, la polyarthrite rhumatoïde, la rectocolite hémorragique, la myasthénie, le diabète insulinodépendant, la sclérodermie pour les plus connues mais il en existe bien plus.
Pour le Dr Seignalet [5], diminuer la perméabilité intestinale et les aliments qui la déclenchent permettrait de diminuer l’incidence des maladies auto-immunes.
Les maladies auto-immunes ne se guérissent pas, car il est impossible d’agir sur la mémoire immunitaire. Mais il est possible de diminuer fortement les symptômes en adaptant son mode de vie, et en commençant par prendre soin de sa barrière intestinale.
On peut aussi attribuer à l’intestin perméable l’origine de certains cancers et d’autres pathologies comme la fibromyalgie, des pathologies neurodégénératives, des troubles du comportement, schizophrénie, autisme, hyperactivité, dépression ainsi que des troubles circulatoires, acné, obésité…
- La fatigue par carence en micronutriments [2] : lorsque que la capacité d’absorption est altérée, cela entraîne une mauvaise assimilation des micronutriments. Cela pouvant engendre des carences et amener un état de fatigue, jusqu’à une anémie par exemple. De plus, les hormones, les enzymes et d’autres éléments indispensables à la santé de l’organisme seront en manque de micronutriments pour pouvoir fonctionner de manière optimale.
- La surcharge hépatique [2]: Le foie assure plusieurs fonctions au sein de l’organisme. Tout d’abord, l’élimination des toxines et des substances comme les médicaments, l’alcool, la caféine et bien d’autres. De plus, il synthétise le cholestérol et du glucose (à partir de lipides et de protéines). Enfin, il permet le stockage du glucose sous forme de glycogène et des vitamines liposolubles (A, D, E, K).
L’hyperperméabilité intestinale, et aussi la dysbiose, favorisent la production de toxines, qui vont devoir être éliminées par le foie. Cela va augmenter le travail du foie et diminuer les sécrétions biliaires (permettant notamment l’absorption des graisses). La surcharge de travail, si elle est chronique, va se « fatiguer » et des déchets vont passer dans le sang. Le sang sera « pollué » et alimentera moins bien les cellules, tissus et organes du corps. Cette énergie déployée pour détoxiner l’organisme va perturber le fonctionnement des cellules, notamment leur réparation, leur synthèse et leur régénération et, dans le même temps induire, la production de radicaux libres.
Selon Carrio [2], les troubles de la détoxination, se manifestent par
- Des nausées
- Des céphalées
- Une intolérance inhabituelle à l’alcool ou au café
- Une digestion difficile
- Une sensibilité anormale aux parfums ou aux odeurs
Lors de cette accumulation de toxines, l’organisme doit les éliminer par d’autres voies que celles des reins, du côlon et du foie. Ces voies sont composées par la peau, qui va réagir en développant des boutons, les poumons où on aura un excès de mucus, une bronchite chronique ou encore de l’asthme. On a aussi le tube digestif, où vont apparaître colites, colite lymphocytaire, colite collagène, maladie de Crohn, gastrite et duodénite. Enfin, les muqueuses auditives, buccales, nasales, pharyngés, laryngés et conjonctivales [5].
A savoir : les organes permettant l’élimination des déchets de l’organisme sont appelés émonctoires.
Nous parlons dans ce cas de la « théorie de l’encrassage » énoncée par le Dr Seignalet [5]. Elle s’explique par le fait que les capacités d’élimination des déchets alimentaires et bactériens dépassent les capacités d’élimination des différents émonctoires de l’organisme.
Selon le Dr Seignalet, les cellules encrassées [5] :
- Meurent : ce qui peut provoquer la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson (en fin d’évolution) …
- Fonctionnent insuffisamment : ce qui peut provoquer la maladie de Parkinson (en début d’évolution), le diabète non insulino-dépendant (type 2, en début d’évolution)
- Fonctionnent de travers : ce qui peut provoquer une hypercholestérolémie, l’arthrose etc.
- Souffrent : fibromyalgie, spasmophilie etc.
- Deviennent maligne : ce qui peut provoquer certaines leucémies ou cancers tels que celui du sein, de la prostate, du côlon ou du rectum etc.
On comprend bien ici l’importance d’un intestin en bonne santé afin de limiter l’apparition d’un maximum de pathologies.
7.3. La mesure de l’hyperperméabilité intestinale [5]
On peut mesurer la perméabilité de l’intestin, afin de connaître l’état de la muqueuse intestinale. Pour la mesurer, on utilise des substances inertes, qui franchissent la muqueuse sans aide et sans transformation, et qui sont ensuite éliminées dans les urines, où leur débit est mesuré après une charge orale.
Les principaux tests utilisent :
- Lactulose/mannitol
- Chrome 51/EDTA
- L Rhamnose
- Polyéthylèe glycol
- Technetium 99/EDTA
Ces tests sont non-invasifs et s’adressent aux personnes voulant avoir une information sur la qualité de leur muqueuse intestinale afin de rester en bonne santé, aux personnes ayant des troubles digestifs récurrents, ou plus graves comme des inflammations ou des maladies auto-immunes. Enfin, ce test peut intéresser les sportifs réguliers, car ils sont sujets à avoir un intestin perméable [17].
8. Le cas particulier du sportif
Les sportifs mettent leur corps à rude épreuve lors des entrainements ou des compétitions. Il est donc important pour eux, de savoir quelles sont les conséquences pour leurs intestins.
8.1. Les problèmes digestifs et d’hyperperméabilité
Les athlètes sont touchés par des perturbations de la flore intestinale [19]. Pour exemple, 91 % des sportifs d’endurance, s’entraînant à hauteur de 13 heures par semaine ont des perturbations de la flore intestinale, avec des bonnes bactéries sous-représentées alors que les mauvaises sont surreprésentées [19]. De manière plus générale, les athlètes exposés à l’exercice à haute intensité montrent une augmentation de l’apparition de symptômes gastro-intestinaux, comme des crampes, diarrhées, ballonnements, nausées et saignements [17]. Ces problèmes ont été associés à des altérations de la perméabilité intestinale et à une diminution de la fonction de barrière intestinale. L’augmentation de la perméabilité gastro-intestinale, l’hyperperméabilité, conduit également à une augmentation de l’endotoxémie, ce qui entraîne une sensibilité accrue aux maladies infectieuses et auto-immunes, à cause de l’absorption de pathogènes et de toxines dans les tissus et dans la circulation sanguine [17]. Et de manière réciproque, le sport augmente les taux d’endotoxine, ce qui augmente la perméabilité intestinale [20]. La recherche sur l’exercice et la fonction de barrière de l’intestin, suggère que plus l’exercice est intense, plus la perturbation de la barrière est importante [20]
8.2. L’ischémie-reperfusion intestinale chez le sportif :
Il faut savoir qu’au repos, l’irrigation sanguine du système digestif est très importante. En revanche, lors d’un effort, le sang est acheminé du système digestif vers les muscles en mouvement et la peau. L’irrigation et donc l’oxygénation et l’apport en nutriments de l’appareil digestif peuvent diminuer de 80 %, voire plus [19]. La pénurie d’oxygène et son retour après l’effort, peuvent induire des dégâts au niveau de la muqueuse intestinale (atteinte des cellules de la muqueuse intestinale et des jonctions serrées). Outre la destruction cellulaire par l’intermédiaire des radicaux libres, qui sont apportés en masse au moment de la réperfusion, des saignements peuvent apparaître. La répétition des entrainements va maintenir la muqueuse intestinale agressée et donc l’hyperperméabilité.
A savoir : Ces problèmes sont aggravés par la déshydratation, l’hyperthermie et l’hypoglycémie. Il faut savoir que les coureurs à pied sont davantage touchés par ces problèmes à cause des secousses qui joueraient un rôle dans l’apparition de ces problèmes.
8.3. La flore intestinale du sportif
Cependant, en ce qui concerne le microbiote intestinal, le sport semble être favorable à sa diversité. Une étude a montré que l’entrainement cardio-respiratoire est corrélé avec l’augmentation de la diversité microbienne chez les humains en bonne santé en favorisant la production de butyrate. Etant que la diversité accrut du microbiote et la production de butyrate sont associées à la santé globale de l’hôte [21], il semblerait que le sport apporte des bénéfices sur la santé intestinale. Une étude tente d’expliquer ces résultats [22], en avançant l’hypothèse que ce processus est lié aux effets de l’exercice sur le dialogue entre le système immunitaire et le microbiote. Par ailleurs, ces résultats peuvent être obtenus en respectant la dose minimum d’exercice recommandé par l’OMS [23]. Les résultats indiquent que l’activité physique effectuée à faibles doses mais en continu peut augmenter l’abondance de bactéries favorisant la santé (Bifidobacterium spp, R. hominis, A. muciniphila et F. prausnitzii) dans le microbiote [23]. Cependant, cette étude n’a pas mis en évidence une augmentation de la diversité de la flore intestinale. Mais elle a émit l’hypothèse, que les longues périodes d’inactivité peuvent induire des changements dans le microbiote intestinal.
9. Le cas particulier du nouveau-né
Comme nous l’avons vu plus haut, le nouveau-né est colonisé par les bactéries de sa mère, ce qui implique qu’il est important que celle-ci possède une bonne flore afin que son enfant puisse en bénéficier [2]. On comprend donc que la naissance par césarienne va ralentir l’installation d’une bonne flore intestinale et bouleverse le système digestif et immunitaire de l’enfant [2]. L’enfant devra donc compter sur la multiplication de ses propres bactéries, ce qui peut provoquer une augmentation du volume de l’intestin et des troubles digestifs [2], commun aux nouveau-nés. De plus, le nouveau-né possède un intestin hyper-perméable [2-6], car les jonctions serrées de l’intestin ne se ferment qu’à l’âge de 6 mois [2]. Le rôle de barrière de l’intestin ne sera pleinement efficace qu’à l’âge de 2 ans lorsque les jonctions serrées seront efficaces, que la sécrétion de substances protectrices sera harmonieuse, ainsi que celle d’IgA [6] . Cela implique qu’il ne faut pas diversifier l’alimentation du nouveau-né avant 6 mois, en le nourrissant au sein. En effet, si des protéines étrangères passent la barrière intestinale, elles peuvent engendrer des réactions allergiques avec la formation d’anticorps spécifiques, pouvant provoquer dans le futur l’apparition de maladies auto-immunes, par une réaction croisée, dont nous avons parlé plus haut. Cependant, l’intestin hyperperméable du nouveau-né, permet le passage des IgA de la mère, présentes dans le lait maternel, les IgA pénètrent donc dans la circulation sanguine du nouveau-né, ce qui joue un rôle de protection au niveau des muqueuses [6].
Par ailleurs, une composition défectueuse du microbiote de l’intestin dans l’enfance influe sur la maturation du système nerveux central et pourrait donc favoriser le développement de troubles mentaux tels que l’autisme, la dépression ou autres [24]. L’étude des événements survenant lors la jeune enfance, comme le stress, un mauvais microbiote, sur le développement de pathologies à l’âge adulte peut être intéressant à étudier.
10. Le cas particulier du stress
Le stress chronique entraîne la libération d’adrénaline et de noradrénaline [2], ce qui provoque une vasoconstriction, avec un débit sanguin qui augmente au niveau du cerveau et du cœur au détriment de l’intestin. Au relâchement, on observe une redistribution intense du flux sanguin, au niveau des organes digestifs en provoquant notamment une ischémie-perfusion, [2]. De plus, le stress chronique augmente la perméabilité intestinale en stimulant les mastocytes, en altérant l’expression des jonctions serrées et en augmentant l’expression des cytokines pro-inflammatoires tout en n’ayant aucun effet sur le transport actif à médiation nerveuse [25]. De plus, lors d’un stress, l’énergie est utilisée par les organes nobles (comme le cerveau et le cœur par exemple), ce qui engendre une diminution de l’énergie attribuée pour la sécrétion d’enzymes digestives [2]. Les aliments sont donc moins bien dégradés. Au niveau immunitaire, des infections bactériennes, virales, parasitaires, mycosiques peuvent devenir fréquentes, ce qui peut engendre un déficit d’IgA [2].
A savoir : Un excès ou un défaut d’acide dans l’estomac peut entraîner un stress du système digestif.
11. Le transit intestinal
On ne peut parler des intestins sans parler du transit. En effet, il est important de surveiller son transit intestinal afin de connaître l’état de santé de nos intestins. En premier lieu, on voudrait connaître quelle est la fréquence idéale de défécation. Or, la forme des selles est un meilleur prédicateur du temps de transit intestinal que la fréquence de défécation, qui parfois n’a aucune valeur prédictive [26]. Il faut savoir, que la forme des selles est utilisée dans la recherche et dans l’étude clinique.
Pour suivre l’évolution de votre transit je vous conseille de vous référer à l’échelle de Bristol [26].
Les selles de type 1 et sont signe de constipation. Les selles de type 3 et 4 sont les selles idéales. Les selles de type 5, 6 sont acceptables, et le type 7 est synonyme de diarrhée.
Une diarrhée est signe d’un intestin qui ne va pas bien, elle peut être provoquée par [2] :
- L’élimination d’un virus ou d’une bactérie
- Une intolérance sévère à un aliment
- Une accélération du transit par excès de stress
- Une consommation rapide et excessive de boisson riche en caféine
Les diarrhées s’arrêtent en générale d’elle-même au bout de 24 à 48 heures.
SIcet article vous a sensibilisé à la santé de votre intestin, je vous invite à suivre les conseils alimentaires que je donne sur ce site afin d’en prendre soin au maximum. De plus, j’aborderai bientôt la supplémentation pouvant vous aider à maintenir votre intestin en bonne santé.
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